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LE GASPILLAGE ALIMENTAIRE : UN NON-SENS!

Chaque année, Recyc-Québec estime que 1,2 million de tonnes d’aliments, qui auraient dû être consommés, finissent aux poubelles au Québec. C’est l’équivalent de près de 37 000 gros camions de déchets! C’est d’autant plus choquant quand on sait que près de 239 500 Montréalais ont sollicité une aide alimentaire en 2024.

Face à cette situation, il faut agir, tant au niveau individuel que collectif. C’est précisément l’un des objectifs que se sont fixés les services alimentaires du CIUSSS-EMTL dans le cadre de leur plan d’action en alimentation durable. Avec plus de 5 millions 770 000 repas servis chaque année, les pertes alimentaires au sein de notre CIUSSS peuvent vite devenir considérables.

Réduire à la source : un choix gagnant

Dans leur combat contre le gaspillage de denrées, les services alimentaires du CIUSSS-EMTL ont déployé une stratégie aussi simple qu’efficace : la réduction à la source. Justine Thouin, coordonnatrice des services alimentaires, explique avec conviction cette philosophie.

« Le meilleur déchet, c’est celui qui n’existe pas! Ça fait donc plusieurs années que nous travaillons à diminuer nos pertes, en collaboration avec l’équipe du développement durable. Nous agissons en amont pour améliorer nos pratiques avec les gestionnaires, particulièrement en matière d’approvisionnement. Fini le temps où nous achetions systématiquement plus que nécessaire par simple précaution. Aujourd’hui, nous nous efforçons de commander la quantité exacte. »

Un comportement qui porte déjà ses fruits : les bénéfices environnementaux sont tangibles, et les retombées économiques, substantielles!

La réalité complexe des surplus inévitables

Malgré une gestion de plus en plus rigoureuse, l’équation parfaite reste difficile à atteindre. En effet, les équipes doivent préparer suffisamment de repas pour satisfaire les besoins des usagers et des employés, mais certains facteurs échappent à tout contrôle. Un imprévu, comme une tempête de neige, peut entraîner une grande quantité de nourriture gâchée. À cela s’ajoutent les normes ministérielles strictes auxquelles les services alimentaires doivent se conformer pour garantir la qualité des mets.

« Nous avons l’obligation d’offrir des menus très variés, » précise Justine. « Parfois, nous avons des surplus d’un plat, comme de la lasagne, qui sont encore parfaitement consommables, mais nous ne pouvons pas les réutiliser le lendemain comme deuxième ou troisième choix. »
C’est ici qu’une deuxième stratégie entre en jeu : redistribuer les surplus vers ceux qui en ont le plus besoin!

La Tablée des Chefs, un allié de taille!

Pour lutter contre le gaspillage de denrées et la faim, certains services alimentaires ont mis en place des projets de redistribution des excédents de nourriture.

À travers le CIUSSS-EMTL, une véritable chaîne de solidarité s’est créée. L’Institut universitaire en santé mentale de Montréal fait figure de pionnier avec son initiative « Les Petits Plats », orchestré en collaboration avec sa fondation.

Dans son sillage, l’Hôpital Maisonneuve-Rosemont (HMR), l’Hôpital Santa Cabrini (HSCO), ainsi que les CHSLD Biermans et Nicolet ont noué un partenariat précieux avec La Tablée des Chefs, un organisme qui facilite les dons alimentaires.

Les Petits Plats de la Fondation HMR visent à réduire le gaspillage alimentaire.

La Tablée des chefs joue un rôle crucial dans cette logistique, relevant le défi complexe de coordonner donneurs et bénéficiaires, une tâche qui pourrait autrement submerger des équipes déjà fort sollicitées, qui luttent contre l’insécurité alimentaire. En résumé, la Tablée des chefs procède à des mises en relation entre les donateurs et des organismes locaux, en fonction de leurs besoins et de leurs contraintes.

Nathalie Fortier, cheffe de secteur production et distribution renchérissent sur la fluidité des échanges : « Il n’y a eu aucun enjeu à implanter le projet. Le processus est très simple. Nous avons contacté La Tablée, et une semaine plus tard, un organisme est venu récupérer nos excédents. Au début, c’était le Cap St-Barnabé, puis les Pirates verts. »

Les Pirates verts, un OBNL ancré dans Hochelaga-Maisonneuve, incarnent parfaitement cette mission de lutte contre la précarité alimentaire. Son fonctionnement repose entièrement sur l’implication de bénévoles comme André Bordeleau, ancien intervenant en milieu scolaire à la retraite, qui se dévoue depuis 2018 à récupérer des denrées un peu partout dans la ville.

Pour André, l’un des avantages de collaborer avec La Tablée des chefs est la réduction du temps consacré à la recherche d’aliments, un point particulièrement crucial. En vue de la cueillette, tout le personnel des cuisines de l’HSCO prépare des plats. « Tout le monde a embarqué rapidement. Ça s’est intégré facilement dans les opérations. C’est devenu un automatisme! » explique Nathalie.

Enzo Di Salvio, chef d’équipe, le confirme : « Ce n’est pas une tâche attribuée à un seul individu. C’est l’affaire de tous. Nous avons choisi de ne pas obliger les employés, car on veut que ça vienne d’eux-mêmes. La plupart participent et font cela avec cœur! »

Christian Doucet s’affaire à remplir les contenants pour la Tablée avec le surplus du déjeuner.

Mais concrètement, comment ça fonctionne? Quel type de nourriture est donnée par l’HSCO exactement? « C’est bien simple, on ne jette rien! Il n’y a pas de gaspillage, on offre tout! » affirme Nathalie. « Tous nos excédents pour les mets préparés, mais aussi les invendus des machines distributrices. Les Pirates verts récupèrent même les croûtes de pain! »

Ces aliments, bien que ne pouvant plus être servis au sein de l’établissement, sont parfaitement consommables et sécuritaires. Pour André, ces dons répondent à un réel besoin : « Plusieurs personnes ne disposent pas d’équipement pour cuisiner, voire même d’un espace d’entreposage pour la nourriture. Dans ce contexte, les plats préparés de l’HSCO sont parfaits pour eux. »

Une grande variété de mets est redistribuée : sauce aux fruits de mer, bœuf bourguignon, pizza ou soupe.

Après chaque cueillette, André transmet les quantités de nourriture ramassées à La Tablée des chefs, qui se charge de compiler les données. Ces informations sont essentielles pour mesurer le taux de réduction du gaspillage alimentaire.

Pour Nathalie, cela permet de maintenir la mobilisation des équipes : « Tous les trois ou quatre mois, je communique aux employés les statistiques de ce qui a été donné et ce qui a été sauvé des poubelles. Je pense qu’ils sont heureux de voir qu’ils contribuent à une cause aussi importante. »

Une distribution humaine et inclusive

Les plats récupérés à l’HSCO seront distribués gratuitement tout au long de la semaine, lors de kiosques de distributions organisés du lundi au samedi dans le quartier Hochelaga-Maisonneuve. La particularité des Pirates verts est qu’ils ne demandent aucune preuve de revenu aux gens qui veulent de la nourriture, contrairement à d’autres banques alimentaires.

« Depuis la pandémie, on sent que le besoin augmente et que le profil des personnes s’est vraiment diversifié, » analyse André. « La précarité ne discrimine pas : elle frappe indistinctement familles, immigrants, travailleurs et étudiants. »

Effort collectif pour un impact durable

Le partenariat avec La Tablée des Chefs affiche des résultats impressionnants : 318 825 portions redistribuées – l’équivalent de 560 réfrigérateurs débordants – ont trouvé leur chemin vers les foyers de ceux qui en avaient le plus besoin.

André nourrit de grandes ambitions pour le futur : « Les efforts que la cuisine de l’Hôpital Santa Cabrini déploie me touchent profondément, car les besoins dans la rue sont criants. J’espère que tous les hôpitaux et CHSLD du CIUSSS vont participer et développer le réflexe de ne pas jeter cette nourriture préparée avec soin. »

Un souhait partagé par Justine Thouin, coordonnatrice des services alimentaires : « Dans un avenir rapproché, notre objectif est de redistribuer tout ce qui est propre à la consommation. Mais pour que cela fonctionne, il faut que certaines conditions soient réunies, comme des espaces de stockage adaptés et surtout une équipe déterminée et mobilisée, afin que ce projet perdure. »

Cette conviction rayonne déjà dans les cuisines de l’HSCO, témoignant qu’un autre modèle est possible. Bravo à eux et à tous les services qui participent à La Tablée des Chefs pour leurs efforts dans la mise en place de pratiques durables et inspirantes!

André et Christian, fiers de contribuer à contrer le gaspillage alimentaire.

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