Avec le temps des Fêtes qui approche, j’avais envie de parler loisirs. Dans les CHSLD, les loisirs prennent une place importante dans la vie des résidents. On m’a suggéré d’aller rencontrer Sylvie Guilmain qui s’occupe des loisirs au CHSLD François-Séguenot depuis 30 ans cette année. Un entretien privilégié pour parler de l’évolution des loisirs dans ces milieux de vie.

Le CHSLD François-Séguenot se situe au bout de l’île de Montréal, sur Notre-Dame. Il accueille 77 résidents. À son arrivée en 1990, Sylvie constate que la majorité des résidents ont une voiture et même un chalet. «À l’époque, les résidents étaient beaucoup plus autonomes! Il y avait 60 résidents autonomes pour 17 résidents qui demandaient une attention particulière. Aujourd’hui, le balancier est complètement inversé.»

S’adapter à la santé des résidents

Ainsi, les loisirs à François-Séguenot ont dû évoluer en même temps que sa clientèle. «Notre approche est beaucoup plus individuelle. Il y a 30 ans, on allait à la piscine faire de l’aquagym une fois par semaine», se souvient Sylvie. Une telle sortie serait impensable avec les résidents d’aujourd’hui.

C’est dans les contacts humains du quotidien que Sylvie tente de faire une différence dans la vie des résidents. «On va dans les chambres pour discuter avec les patients, faire un casse-tête ou juste parler. C’est toute une organisation de rassembler tout le monde en bas!» Autrefois, les résidents s’organisaient des parties de carte entre eux. «La clientèle n’a plus la même énergie pour avoir cette auto-détermination. Ils attendent souvent le bénévole pour débuter l’activité prévue.»

La plus belle job au monde

Même si l’alourdissement de la clientèle amène des défis, Sylvie reste convaincue qu’elle fait le plus beau métier du monde. «Le loisir, c’est rendre le monde heureux. Il n’y a pas de plus belle job au monde», dit-elle une étincelle dans les yeux. Je n’ai aucun doute que son sourire espiègle et son énergie débordante contaminent les résidents. La doyenne des employés du CHSLD s’amuse d’ailleurs à dire qu’elle est la mémoire de l’établissement.

Elle martèle le besoin d’une équipe soudée pour travailler aux loisirs dans un CHSLD. «On intervient avec les résidents, mais on travaille en étroite collaboration avec les bénévoles, les équipes de soins, la famille, la cuisine même!» En charge de l’équipe des bénévoles, Sylvie remarque aussi une évolution. Auparavant, on voyait beaucoup de femmes à la maison qui voulaient se désennuyer. Il y avait une grande reconnaissance, le sentiment d’avoir donné un sourire à quelqu’un.

«Aujourd’hui, la clientèle est plus lourde et parfois, on n’est pas certain de l’impact de l’activité sur les résidents. C’est là où je m’assure de donner une reconnaissance aux bénévoles, avec des mots d’encouragement.»

Pour Sylvie, travailler en loisirs dans un CHLSD, c’est aussi être à l’aise de poser une question sans nécessairement avoir une réponse. «Il faut être à l’aise avec les résidents, leur laisser le temps de parler même si ça peut être long des fois. On est souvent dans la performance et pressé dans le temps. Mais parfois, la performance, c’est de prendre le temps.»

Le plus beau temps des Fêtes

Lors de ma visite, Sylvie préparait le souper de Noël. Deux soirs en décembre, les résidents recevront leur famille pour souper dans un décor féérique. «C’est un travail colossal d’organisation, mais c’est tellement valorisant. C’est comme si les résidents recevaient leurs enfants chez eux, comme avant. Ils sont si fiers.»

D’ailleurs, des employés de l’établissement viennent prêter main forte pour cette soirée, même s’ils sont en congé. D’anciens employés avouent ne pas pouvoir manquer cet événement.

On prépare aussi tout un décor sur la terrasse, avec une soirée d’illumination des sapins de Noël. «Les résidents sont très contemplatifs. Des fois, je vois des familles venir regarder ensemble la beauté des lumières des sapins. Juste ça, c’est assez pour leur donner le sourire.»

Décrocher un sourire à la fois

Pendant toute l’entrevue, une question me chicotait. Mais on dirait que j’avais peur de la poser. J’étais soufflée par l’énergie et la passion de Sylvie. Comment peut-on garder la flamme aussi vive pendant 30 ans?

«Chaque matin, je viens au travail en me disant que les résidents ont besoin d’une personne dynamique, énergique. Je suis là pour leur donner un sourire, pour être une bougie d’allumage. Ils n’ont souvent plus l’énergie pour même entrer en contact avec les autres. Alors, je fais ce travail pour eux.»

Sylvie avoue que de travailler dans un CHSLD permet d’apprivoiser la mort, petit à petit. «On s’attache aux moments de plaisir qu’on a eus avec eux. Et quand ils nous quittent, on se dit qu’il y aura quelqu’un d’autre qui aura besoin qu’on lui décroche un sourire.»

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