Urgence HMR

Dans les médias, on parlait d’une situation hors de contrôle. À l’interne, il y a eu plusieurs rencontres pour trouver des solutions rapidement. L’urgence de l’Hôpital Maisonneuve-Rosemont atteignait un niveau d’engorgement très élevé. J’ai donc décidé d’aller y faire un tour, la nuit.

J’avoue que, quand mon alarme a sonné un dimanche soir à 23 h, j’ai eu envie de l’arrêter. Pourquoi vouloir, de mon plein gré, travailler la nuit? C’était quoi mon problème? Et là, j’ai pensé à toutes ces infirmières, aux préposés, aux médecins. Ils ont fait un choix de travailler de nuit. J’avais envie de comprendre pourquoi!

Minuit 25

La tempête de verglas tant attendue s’est plutôt transformée en petite neige douce. Dans le stationnement de l’HMR, des camions de déneigement font leur travail pour accueillir tous ces gens qui seront là dans huit heures à peine.

J’entre à l’urgence. J’avais une appréhension. J’avais peur de voir tant de gens malades, mal en point. À ma grande surprise, il n’y avait que quelques personnes dans la salle d’attente. On entendait les néons zébrer le silence.

À l’accueil, Alexandre me dirige vers la salle du personnel où je peux déposer mon manteau.

Je me glisse dans la salle de traitement. Le centre nerveux de l’urgence. Après le triage, c’est là que les patients reçoivent les traitements nécessaires à leur condition. Ça bourdonne dans un calme étonnant. Dr Marie-Ève Désilets m’approche. Disons qu’avec ma caméra, je ne passais pas tellement inaperçue!

Le calme après la tempête

C’est la phrase que tout le monde avait sur les lèvres. Le temps des Fêtes est toujours un moment difficile pour les urgences avec l’augmentation des sorties, des contacts… Le climat parfait pour la prolifération des virus et bactéries. Cette nuit-là, on voyait que les gens pouvaient souffler un peu.

«Je suis une infirmière senior. J’aime mon travail. J’aime être avec les jeunes infirmières qui commencent pour les accompagner», dit Annie, dans la salle de monitoring. Les patients alités dans cette section ont besoin d’une surveillance avec un moniteur cardiaque.

Annie travaille depuis dix ans à l’urgence. Sa collègue Stéphania apprécie la présence d’Annie. «On est une équipe solide et amicale. Si ce n’était pas de l’équipe, mon travail serait moins intéressant», affirme l’infirmière qui termine tout juste sa première année à l’urgence.

Une camaraderie

Je prends quelques photos de Stéphania, Annie et Nancy, préposée. Soudainement, d’autres personnes s’agglutinent autour de nous. «Viens, on va prendre une belle photo de groupe!» Les filles sont fières de pouvoir compter l’une sur l’autre. Elles sourient, heureuses de travailler ensemble.

Dans une autre section de l’urgence, l’observation, je rencontre Caroline et Jean-Philippe. Adjointe administrative (commis) depuis 20 ans, Caroline travaille depuis 18 ans de nuit. «J’aime la nuit. J’aime le silence. On est autonome et débrouillard. On fait nos choses pour s’assurer du bien-être des patients. On est une belle équipe», estime-t-elle.

Jean-Philippe, infirmier auxiliaire depuis huit ans, fait partie d’une équipe volante. Il est «prêté» à l’urgence. «La nuit, on a le temps de faire ce que l’équipe de jour n’a pas eu le temps de faire dans les dossiers des patients. Pas par négligence, mais parce que le jour, c’est très exigeant et les demandes sont constantes», explique-t-il.

Cette conversation à trois dure quelques minutes. Je remarque la complicité entre Caroline et Jean-Philippe qui se relancent et rigolent. Jean-Philippe admet que c’est drôlement tranquille comparativement à la semaine dernière. «Ce n’est pas représentatif de la situation actuelle. À l’urgence, c’est soit tranquille ou soit tellement occupé, qu’on court partout! L’entre-deux est assez rare.»

Au bout du corridor

Je passe une dernière porte. La salle de réanimation est impressionnante avec tous ces appareils! C’est ici que les ambulances arrivent avec des patients en choc, avec des besoins urgents. François Olivier Gagnon, Jean-Luc Ferland, infirmiers, et Skander Randjia, assistant-infirmier-chef (AIC) viennent d’accueillir une patiente. «On ne peut pas travailler seuls. Il faut travailler en équipe pour assurer une continuité des soins», affirme François Olivier, qui travaille de soir à l’urgence.

Jean-Luc Ferland travaille à l’urgence depuis six ans. «J’ai fait un mois de jour. Je suis revenu de nuit. J’aime le beat de nuit.» L’imprévu, le silence, les relations familières avec les collègues et le travail d’équipe serré font en sorte que Jean-Luc préfère travailler la nuit.

4h15

Je bâille. Mes jambes sont lourdes. Pour les travailleurs de nuit, c’est une heure difficile. Et pour moi aussi. Ma concentration diminue. Vous devriez voir mes notes! Comme si ma main avait décidé que l’écriture compréhensible ne faisait plus partie de ses capacités!

À ce moment, j’avais l’intention de terminer le quart de nuit à l’urgence de l’Hôpital Santa Cabrini Ospedale. Or, je dois me rendre à l’évidence. Je serai beaucoup plus efficace d’y aller à un autre moment. Et là, j’ai une pensée pour tous ces travailleurs qui enfilent deux quarts de travail de suite.

Mes hommages à vous.

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