Dans le sous-sol du Pavillon d’Éducation Communautaire du quartier Hochelaga se prépare Un visage à gagner, une pièce dont les acteurs sont des patients et des intervenants de l’Institut universitaire en santé mentale de Montréal. Les deux ergothérapeutes en charge de ce projet m’ont invitée à une répétition de cette pièce de théâtre bien spéciale.
Mise en scène par Claudia Bilodeau, la pièce de théâtre a été pensée et écrite par les usagers et les intervenants. «C’est une oeuvre théâtrale fantaisiste qui questionne les inégalités sociales et notre sens de l’humanité», explique la metteure en scène.
Le succès d’un projet
Le projet de théâtre a été mis sur pied par deux ergothérapeutes et un infirmier du programme des troubles psychotiques de l’IUSMM. Sous le nom des Artistes Anonymes, la troupe de théâtre travaille sur 16 semaines sur tous les plans de la production. «Nous en sommes à la troisième année du programme. La réponse a été immédiate de la part des usagers. Il y avait un réel désir de reprendre les planches», explique Saolie Dubois, ergothérapeute.
On a un noyau de quelques usagers qui reviennent. Il y a aussi des nouveaux usagers qui ont vu la pièce l’an dernier et qui ont eu envie de participer cette année.
Saolie Dubois, ergothérapeute
Pour sortir de l’isolement
Les ergothérapeutes travaillent avec la troupe sur les habiletés qui leur permettent de regagner un niveau de fonctionnement pour vivre en communauté. «Ce n’est pas une pièce de théâtre occupationnelle. On a des objectifs à atteindre pour aider les patients. On voit une amélioration sur plusieurs aspects pendant le programme de théâtre. Les usagers gagnent en confiance en eux, arrivent à mieux communiquer et à entrer en interaction avec les autres. Ils apprennent à mieux travailler en équipe, à s’entraider. C’est vraiment une belle façon de travailler avec eux», constate Carmela Schiraldi, elle aussi ergothérapeute.
Financé par la Fondation de l’IUSMM, le projet théâtre permet aux usagers en interne et en externe de travailler à un projet collectif. «Le sentiment d’appartenance à un groupe a un impact important sur les usagers. Des amitiés se créent. Ce sont souvent des gens isolés socialement. Ce groupe permet de faire des contacts en dehors de l’hôpital.»
Le prétexte pour soigner
Le théâtre permet un contexte plaisant et naturel où les patients peuvent exprimer leurs émotions. «On voit les interactions entre eux, le non-jugement, l’entraide, la bienveillance se développer sous nos yeux. Ils deviennent attentifs aux autres. Le théâtre est un contexte qui crée un climat naturel de thérapie. Ils finissent à oublier qu’il y a des intervenants et que c’est une forme de thérapie.»
La pièce permet aussi de sensibiliser le public à la réalité des usagers. «Naturellement, les gens avaient envie de parler des inégalités. Claudia guide les ateliers d’écriture, notamment de l’écriture automatique. Toutes les phrases de la pièce viennent des usagers qui ont participé aux ateliers d’écriture.»
Le théâtre est aussi un prétexte pour normaliser certaines émotions, comme le trac. «C’est important pour nous de jouer avec eux. Ça nous permet de parler des émotions et de leur montrer que tout le monde en vit.»
«Ça donne un sens à notre travail ce genre de projet comme ça.»
Carmela Schiraldi, ergothérapeute.
La pièce sera présentée à la Maison de la culture Mercier
le jeudi 26 mars à 19h.