Afshin Khazeni est technologue en radiologie à l’Hôpital Maisonneuve-Rosemont depuis plus de 23 ans. Il a fait tous les départements avant de trouver sa place depuis 16 ans au bloc opératoire. Arrivé de l’Iran, seul, sans ses parents à 14 ans, il raconte son histoire par un livre, Passeport pour ailleurs.

Publié en 2016, Passeport pour ailleurs parle de son parcours, ses difficultés et ses réussites en tant qu’immigrant d’âge mineur. Son histoire est portée à l’écran dans le documentaire Seuls qui a été diffusé à Télé-Québec cet automne.

Arriver au Québec à 14 ans

«Quand je suis arrivé au Québec, j’ai été dirigé dans un classe d’accueil pour apprendre le français. Ç’a pris deux ans avant que je puisse aller dans une classe régulière», se rappelle Afshin.

À son arrivée, on lui a présenté Paul-Émile Lauzon. Cet homme accueillait des enfants immigrants. Il a accueilli Afshin chez-lui jusqu’à ses 18 ans. Décédé il y a quelques années, Afshin l’appelle toujours papa. «À 18 ans, il me restait un an de secondaire. J’ai dû terminer à l’éducation aux adultes. J’ai été évalué et recalé en français de niveau primaire. En un an, j’ai rattrapé mon français jusqu’en secondaire 4. Je voulais vraiment réussir», raconte-t-il, le regard encore très déterminé.

Les embuches se sont accumulées, ajoutant de la difficulté à voir le moment où il pourrait trouver du travail. «J’avais déjà rencontré ma femme. On a trouvé ensemble une profession qui me permettrait de bien vivre sans me salir les mains! C’était soi la mécanique ou la radiologie. J’ai décidé de m’inscrire à la technique en radiologie. Je savais que c’était un programme contingenté. Mais je savais aussi que j’avais plus de chance d’être accepté si je prenais des cours au cégep avant. J’ai commencé avec des cours du soir en biologie», explique Afshin.

Être technologue en radiologie exige d’être bon en physique et en biologie. «Il faut être capable de voir le corps humain en 3D pour savoir comment prendre les images et bien positionner le corps», détaille Afshin.

La persévérance est payante

Afshin avait de très bonnes notes en biologie. Mais il n’avait toujours pas son diplôme d’études secondaires en poche. «J’ai rencontré une conseillère aux élèves qui m’a donné une chance en me laissant du temps pour réussir mon secondaire. En un mois, j’avais mon diplôme», précise Afshin. Et il a enfin été accepté à la technique en radiologie.

«Je travaillais comme serveur pendant mes études, en plus de faire mes stages ici à l’HMR. Deux semaines avant l’examen de l’Ordre, j’ai coulé l’épreuve uniforme de français. Je ne pouvais pas avoir mon diplôme», raconte l’Iranien d’origine perse. Un autre obstacle devant lequel Afshin ne s’est pas découragé.

À l’HMR, il travaillait de nuit comme assistant technique avec Charles Sajous, un enseignant du primaire en français, en Haïti. «Charles m’a aidé à passer l’épreuve uniforme de français. Je l’ai coulé trois fois avant de réussir. Mais j’ai finalement reçu mon diplôme», affirme-t-il, fièrement, même près de 30 ans plus tard.

Raconter son histoire pour inspirer

Afshin a écrit un livre parce qu’il s’est rendu compte que beaucoup de gens posaient des questions sur son parcours. Fuyant la guerre entre l’Iran et l’Irak, Afshin a tout laissé derrière lui, dont ses parents. Sa mère lui a laissé un petit livre avec toutes les leçons de vie qu’un parent enseigne quotidiennement à ses enfants. «Je le connais par coeur. Ses conseils m’ont été très utiles. Et je les enseigne à mes enfants aujourd’hui», dit-il, ému en pensant à ses parents qui habitent toujours en Iran.

Il a bien revu ses parents depuis. «Il a fallu six ans après mon départ pour que ma mère puisse venir me voir ici au Canada. Je suis retourné trois fois aussi. Mais mes parents me manquent. Savoir que je ne peux pas être près d’eux s’ils tombent malade…», dit-il, la gorge visiblement serrée.

Reconnaissant de l’accueil reçu par le Canada, Afshin souhaite parler du parcours des immigrants, des nouveaux arrivants. «On n’entend pas souvent de nouveaux arrivants remercier le peuple québécois de leur accueil. De l’autre côté, je veux aussi montrer à d’autres immigrants qu’on peut se relever devant les difficultés. Il faut garder espoir de réussir», croit-il.

Visite dans les écoles

Ainsi, Afshin, avec l’auteur du livre, Emilie Lussier (qu’il a rencontré grâce à l’HMR), visite des classes de cinquième et sixième année du primaire. «Je leur dis que j’avais presque leur âge quand je suis arrivé ici, seul. Je leur parle de l’école, de la différence. De l’intimidation aussi. Les enfants sont curieux de connaître différents parcours de vie. J’essaie de les faire rire aussi… Je suis comme ça», dit-il, l’air taquin.

Quand on lui demande ce qui lui manque le plus de l’Iran, il répond immédiatement : «les odeurs». «L’odeur des betteraves chaudes qu’on vend dans la rue. Je mangeais ça en revenant de l’école…», raconte-t-il, le regard perdu quelque part dans ses souvenirs, le sourire aux lèvres.

Pour lui, tous les immigrants ont une histoire incroyable. Et on gagnerait à les entendre davantage. Vous êtes employés du CIUSSS et vous avez envie de nous raconter votre histoire d’immigration? Écrivez-nous!


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